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 Bienvenue sur "Web Song": Site de chroniques musicales pour progueux et autres grands mélomanes.

Le site est en construction permanente et il est à nouveau en activité (après une pause trop longue à mon goût). Néanmoins, on peut déjà voir les albums qui seront chroniqués même si les chroniques sont, encore, en construction! A ce jour, le site possède 48 chroniques complètes. Bonne visite!

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Can: Tago Mago (Krautrock)

 Tago Mago (Can/1971)




Une musique et un groupe à part. Can restera, probablement, la formation la plus incroyable et la plus exceptionnelle du rock du vingtième siècle; une équipe hors pair au potentiel de feu. Jaki Liebezeit; batteur de jazz à la rythmique nucléaire et expert dans les musiques ethniques. Holger Czukay; contrebassiste de jazz (également !) et professeur de musique, il fut aussi un élève de Stockhausen. Irmin Schmidt; compositeur et directeur d’orchestre au conservatoire, multi-instrumentiste d’exception et proche de Ligeti. Michael Karoli, violoniste et, surtout, guitariste brillant exprimant une admiration et une fascination sans borne pour Jimi Hendrix et le Velvet Underground. Et enfin, le chanteur japonais Damo Suzuki (qui arriva au sein du groupe suite au départ du chanteur noir américain Malcolm Mooney qui sombra dans une grande dépression après l’enregistrement du premier album du groupe: Monster Movie). Si ce dernier reste le membre le plus discret de ce collectif pour le moins étrange, sa voix envoûtante, sensuelle et sauvage n’en demeure pas moins une des composantes du son de Can.

On ne le dira jamais assez mais, sans vouloir jouer les vieux cons réactionnaires, c’est durant les années 1960 et 1970 que le rock a pu jouir de ses plus grandes heures de liberté, de folie et d’audace, et ce fameux Tago Mago reste le témoignage le plus authentique de cette période de grandeur artistique. Après s’être consacré à la bande son de différents films tels Cream, Deep End, Deadblock et Mädchen Mit Gewalt (réunis sur le disque Soundtrack), la fameuse boîte de conserve du rock germanique reprend son parcours avec ce deuxième disque qui restera, certainement, son chef-d’œuvre suprême. Deux disques (quoi de plus normal ?), quatre faces aussi différentes les unes que les autres, quatre merveilles de sauvagerie électronique et de fièvre psychédélique et sexuelle. Commençons, si vous le voulez bien (et vous le voulez !) par le premier disque et sa première face. Paper House, Mushroom et Oh Yeah, trois titres mélangeant, avec la plus grande classe, psychédélisme surréaliste et planant avec des torrents rock agressifs et violents qui font, largement, passer les caillasses de Mick Jagger pour des musiciens de cabaret. Paper House ouvre, donc, le festival sur une ambiance planante qui se transforme, vite, en improvisation furieuse enchaînant, ainsi, sur Mushroom, un des titres les plus faciles d’accès du disque, où Damo Suzuki récite une incantation mémorable ("One eyed-soul, mushroom head, one eyed-soul, mushroom head. I was born and I was dead, I was born and I was dead"). Oh Yeah clôt la première face du disque dans la pure tradition des deux titres qui l’ont ouverte. La seconde face est recouverte par un long morceau de 18 minutes (le plus long de l’album); Halleluhwah, suite logique au Yoo Doo Right de Monster Movie. Une longue pièce dynamique et corporelle où la batterie de Jaki Liebezeit est reine.

Le deuxième disque représente le zénith de l'album. C’est sur cette seconde galette que l’on trouve les monstrueux Aumgn et Peking O. Deux longues cérémonies Krautrock qui invitent l’auditeur au pêché, à l’interdit, à l’enfer. Un enfer expérimental où le psychédélisme croise le fer avec le rock et l’électro pour ne former, au final, plus qu’un. Les jeunes oreilles, encore vierges de toute pénétration expérimentale, risquent d’être secouées par ces trente minutes de vertige sonore qui laisseront de grandes cicatrices aux non initiés. La première de ces pièces, Aumgn, hurlement de guerre du groupe aux sonorités hallucinogènes, s’illustre comme une des pièces les plus audacieuses de la musique rock. Tout comme Peking O, délire électronique et archétype du rock psychiatrique et maboule, le titre est dominé par les onomatopées délirantes de Damo Suzuki qui rendraient jaloux n’importe quel créateur de bandes dessinées. Enfin, le disque s’achève sur son titre le plus calme; Bring Me Coffee Or Tea. Pièce composée de longues progressions planantes se rapprochant des grands moments du Pink Floyd de A Saucerful Of Secrets ou de Ummagumma.

Cela fait déjà quelques années que Tago Mago occupe une place particulière et importante dans ma discothèque et, malgré tout ce temps, je n’arrive toujours pas un mettre un mot en particulier sur cet album. Tago Mago échappe à toutes les étiquettes, ainsi qu’ à toute transparence. Il navigue sur des rivages inconnus et dangereux et cultive, généreusement, l’amour de l’étrangeté et le goût du surréalisme. La musique est à l’image de la pochette du double 33 tours (qui représente un cerveau n’arrivant plus, sous l’effet de l’imagination provoquée par la musique, à rester dans la boîte crânienne de son propriétaire); déconcertante. Chef-d’œuvre ultime de Can et une des vingt pièces majeures de la musique rock, ni plus ni moins.

Chronique écrite par Mathieu (Mai 2008).

 



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